Au chic anglais


Le bar de l’hôtel Saint-James, à Paris.
Lundi 12 mars, salle 10 – Drouot-Richelieu.





Un château en plein Paris, vous ne rêvez pas. Même s’il serait plus exact de parler d’hôtel... de luxe, bien sûr, quand on s’appelle Saint-James. C’est en 1892, au 43 avenue Bugeaud, à mi-chemin entre les célèbres avenues Victor-Hugo et Foch et à l’emplacement du premier aérodrome parisien d’où s’envolaient les montgolfières, que madame Thiers fait construire une fondation à la mémoire de son défunt époux, le président de la République Adolphe Thiers (1797-1877). Les hôtes de cet établissement posé au milieu d’un parc ? De brillants étudiants français distingués pour leur savoir et leur esprit, qui viennent là se perfectionner dans l’étude des sciences, de la philosophie ou de l’histoire. 450 pensionnaires s’y succéderont, parmi lesquels Georges Huisman, créateur en 1938 du festival de Cannes, Michel Foucault, Alfred Grosser ou le juriste Maurice Duverger... Rénové en 1985 par Serge Marcel, l’édifice néoclassique est racheté l’année suivante par Peter de Savary, pour être transformé en hôtel. L’homme d’affaires anglais fait appel à la décoratrice Andrée Putman, qui avait signé deux ans plus tôt l’aménagement du Morgans’ à New York, et à Philippe Hurel. Aujourd’hui toutefois, après trois ans de travaux décidés par les nouveaux propriétaires (la famille Bertrand), un nouveau décor accueille le visiteur. Le style Napoléon III déjanté, les coursives ultragraphiques soulignées de noir, le papier peint clin d’oeil aux premiers ballons, les imprimés panthère, les sols en damiers, les lourds rideaux bordés de passementerie de Bambi Sloan ont eu raison de la sobriété. Si la bibliothèque classée a été conservée, le mobilier en a été complètement changé. Rappelez-vous, ces tables basses en chêne et ces gros fauteuils en cuir fauve dans lesquels Bernard Rapp recevait ses invités, de 1987 à 1989, pour son émission télévisuelle dédiée à la culture, L’Assiette anglaise... D’humour et de chic anglais, il est encore question avec Bambi Sloan – ancienne traductrice des épisodes de la mythique série Chapeau melon et bottes de cuir – mais il est plus... décalé. 350 lots de tableaux, gravures, vaisselle, luminaires et, surtout, des meubles – d’Andrée Putman pour beaucoup, d’autres de la maison Perzel. Issus des chambres et des pièces de réception, ces derniers pourraient faire des heureux aux enchères, puisqu’il faut compter entre quelques dizaines et 1 500 euros. Exception faite d’un grand lustre en métal patiné à vasque en verre opaque d’Andrée Putman, à décrocher moyennant 30 000/40 000 euros. La fin d’une époque, le début d’une autre...
N° 10 – 9 MARS 2012 – LA GAZETTE DE L’HÔTEL DROUOT